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7 avril 2006 5 07 /04 /avril /2006 12:35

   Dans son livre "La tragédie du Président - Scènes de la vie politique 1986-2006" (Edition Flammarion 2006), Franz-Olivier Giesbert prolonge son étude précédente sur "Jacques Chirac" (Edition du Seuil 1985) en l'étendant à son entourage... Le terme de "tragédie" est provocant, car il s'agit plutôt d'une "tragi-comédie", voire d'une comédie burlesque, où la présentation des personnages tourne parfois à la caricature...

   Le personnage de Jacques Chirac est évidemment au centre de cette satire, mais la présentation reste ambiguë en raison d'un mélange de cruauté et de bienveillance, comme si l'auteur, à l'instar d'autres biographes, avait une prédilection inavouée pour le héros de son livre :

   - Chirac est, à son avis, un homme fondamentalement "bon" et "sympathique", naturellement porté vers les autres, avec sa main toujours tendue... et son souci constant d'aider ses amis quand ils sont en difficulté... Il est même apprécié par ses adversaires socialistes, à l'exemple d'Allègre qui se fera sermonner par Jospin...

   - Mais Chirac n'en est pas moins un "politique", qui utilise les hommes à son gré, quitte à les oublier ensuite sans le moindre regret. En dehors de Jérôme Monod, son "mentor de toujours" et de Juppé "le meilleur d'entre nous", ses "compagnons" sont rejetés l'un après l'autre : Juillet, M.F. Garaud, Balladur "l'ami de 30 ans" qui le trahit en se présentant contre lui en 1995, Seguin, etc... Seuls lui résistent Bayrou et Sarkozy : tout un programme...

   - Chirac est aussi un "nationaliste", en digne héritier sur ce point du Général de Gaulle, parfois caricatural, puisqu'il définit son action par une opposition systématique aux Etats-Unis, en particulier à Bush junior, dont il rejette le "comportement messianique" (on peut le comprendre...)... Quant à l'Europe, il la défendra avec une honnêteté un peu tardive, mais n'écoutera pas les conseils de Giscard, auteur du Traité, lui demandant de retarder le référendum...

   - Car Chirac est à la fois "entêté" et "versatile"... J.F. Kahn a dit de lui : "Personne ne sait où il est : lui non plus"... Couvé par la Droite, il déteste le libéralisme autant que le communisme... En fait, il sera toujours un "radical-socialiste" - la référence chrétienne en plus - et il a d'ailleurs à l'origine hérité du fauteuil de Queuille en Corrèze... Certes il tentera des réformes, mais à de rares exceptions près (dont celle des Retraites réalisée avec sagesse par Raffarin...), la plupart seront abandonnées, le CPE apparaissant déjà comme le dernier avatar... C'est le triomphe du "ninisme" copié, après Jospin, sur Mitterrand qui appliquait la formule : "La Réforme, en parler toujours, ne la faire, jamais"... Et pendant ce temps, se joue la "tragédie française" avec un PIB par habitant passant du 11ème rang (1970) au 16ème rang (2004), tandis que le chômage atteint des sommets...

   - Il n'en est pas moins vrai que Chirac reste, à bien des égards, un personnage "secret"... On le dit "rustre", mais en fait il possède une haute culture, surtout dans le domaine artistique, où il a un goût particulier pour ce qu'il a appelé les "arts premiers", allant jusqu'à faire naguère des conférences au Japon et en Chine... De même, on le croit "vaniteux" et "roué", alors qu'il manque en permanence de confiance en lui-même et a la conviction de ne pas être "à la hauteur"... "Il se méprise"...

   Chemin faisant, F.O. Giesbert dresse une galerie de portraits du milieu politique, qui n'est pas triste, d'autant moins qu'il s'agit parfois d'observations "mutuelles"... Villepin est pourfendu : "Le Tartarin de l'Elysée"... et, après sa nomination comme 1er Ministre... "Depuis que Villepin a rencontré Villepin, ils ne se sont plus quittés...Ils s'adorent" ... De Madelin : "Cet homme est une blague, avec ses lubies idéologiques"... De Seguin : "Cet esprit chagrin a une si haute idée de lui-même qu'il a fini par la perdre de vue"... D'Allègre, "En voilà un qui a le courage de ses opinions... C'est autre chose que Bayrou qui a passé 5 ans rue de Grenelle à ne rien faire"... De Jospin, "c'est la vertu faite homme"... De Strauss-Kahn, "Héritier d'Edgar Faure, et virtuose de l'enfumage"...Quant à Martine Aubry, il rappelle opportunément "qu'elle est passée en force à l'Assemblée en 1997 pour l'affaire des "35 heures", sans prendre la peine de consulter les syndicats" : Villepin n'a donc rien inventé... Finalement, seule une femme trouve grâce à ses yeux : Bernadette Chirac, d'abord curieusement évincée de l'Elysée ... par sa fille Claude, jusqu'à ce qu'elle soit pratiquement la seule à prévoir la présence de Le Pen au 2ème tour en 2002... Il la montre à la fois "rosse, crue et batailleuse" ... le vrai "homme" de la famille, qui exècre Villepin... et encourage Sarkozy...

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commentaires

C
Pour Bernadette, javais cru comprendre...mais ça n'a pas toujours été le cas ! Cela provient peut-être de la dissolution...<br /> Merci de votre raccourci qui va me permettre de ne pas lire le livre.
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