19 janvier 2010
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En 1549 paraissait la "Défense et illustration de la langue française" de Joachim du Bellay... Conçu à l'origine comme le manifeste du groupe des poètes de la Pleiade, ce texte voulait plus largement assurer le développement de cette langue, dont l'usage s'était progressivement répandu dans le royaume de France avec l'extension du pouvoir des Capétiens, et qui venait d'être reconnu officiellement comme la langue administrative par l'Edit de François 1er à Villers-Cotterets en 1539 ...Et effectivement le Français a été brillamment illustré depuis le 16ème siècle par une "littérature" qui est certainement la plus brillante du monde ...Néanmoins, le Français n'a longtemps été qu'une langue parlée par une élite sociale, et les "dialectes" locaux ont persisté jusqu'à l'époque contemporaine, notamment dans les campagnes, et il a fallu l'exode rural à partir du 19ème siècle et l'institution de l'enseignement primaire obligatoire par Jules Ferry imposant son usage exclusif pour qu'il s'impose définitivement comme langue nationale et figure à ce titre dans l'article 2 de la Constitution...
Mais l'usage du Français ne s'est pas limité à la France, car il s'est imposé aussi dans de nombreux territoires à travers le monde en raison du rôle longtemps primordial de la France, mais aussi à la faveur de son expansion coloniale : d'abord après les Grandes Découvertes en Amérique (Québec, Louisiane, Antilles), puis au 19ème siècle en Afrique ("Nord" et "Noire"), Asie (Indochine, comptoirs de l'Inde) et Océanie (Nouvelle-Calédonie et Polynésie)...où son usage s'est répandu comme langue "véhiculaire" plus commode que les langues "vernaculaires" trop nombreuses ...Cette expansion s'est faite d'ailleurs avec des avancées et des reculs : ainsi le Français a été au 18ème siècle la langue "internationale" utilisée dans la diplomatie et la plupart des Cours d'Europe, avant de reculer au bénéfice de l'Anglais ...Et en Amérique, s'il s'est maintenu dans le Canada grâce à l'attachement très fort des descendants des colons au Québec, il a pratiquement disparu aux Etats-Unis après la vente de la Louisiane par Napoléon 1er en 1803, même si son souvenir persiste dans des noms de lieux comme La Nouvelle-Orléans et de nombreux ...Paris.... Il n'en reste pas moins que le Français est encore la langue "maternelle" ou "nationale" d'environ 285 millions de personnes dans le monde, derrière les 900 millions de "chinois mandarins" et 450 millions "d'anglophones"...
Cette importance numérique, même si elle est surtout dûe maintenant à un progrès démographique, justifie donc que, plus que jamais, le Français fasse l'objet d'une "Défense et Illustration", et que, dans ce domaine, la France donne l'exemple en qualité de "pays d'origine"... A ce titre, l'organisation de la "Francophonie" autour d'elle est une action particulièrement positive, d'autant plus qu'elle est réalisée dans un cadre démocratique assurant l'équité entre tous les pays concernés sans servir de paravent à une volonté prédominante de la France ...Mais il y a aussi des actions négatives pouvant remettre en cause la nature même du Français : d'abord les projets de certains "spécialistes" cherchant à simplifier la langue , sous prétexte qu'elle est abominablement compliquée avec ...son "orthographe" où les exceptions sont aussi nombreuses que les règles ...et sa "grammaire" multipliant les types de complément et les modes et temps de conjugaison ...et cette simplification aboutirait à un "sabir" phonétique du genre "ki é la" ...Jeux de l'esprit sans conséquences, penseront certains ...Malheureusement cet usage est déjà pratiqué avec le développement de l'informatique et notamment des "portables" où, surtout chez les jeunes, on fait des "textos" où un haricot devient "ariko" et, pire encore, un problème devient "pb" ...On ne s'étonne plus qu'après cela de bonnes âmes prêchent le suppression de cet exercice barbare et rétrograde de la dictée ...pardon de "l'ortograf" !...
Il est donc nécessaire - et même urgent- de réagir contre cette dérive...Cela ne signifie pas qu'il faut être "conservateur", c'est-à-dire préserver le Français tel qu'il existe actuellement... Car il s'agit d'une langue "vivante" qui, depuis le Moyen-Age n' a jamais cessé d'évoluer, avec des mots anciens tombés en désuétude (exemple récent :" vélocipède" ou "célérifère") et des mots nouveaux imposés par les techniques (comme "radar" ou "laser") ...Une langue qui a souvent assimilé des mots issus des dialectes locaux (à l'image de la "choucroute" alsacienne ou du "far" breton), et qui ne peut que s'enrichir en rendant à ceux-ci leur juste place ...sans exclusive, c'est-à-dire sans prétendre à se substituer au Français ...Cela vaudra mieux que d'importer des mots d'autres pays comme "breakfast" au lieu de "petit-déjeûner" ou - pourquoi pas - "burqa" au lieu de "voile"...
Car le Français n'est pas seulement une "langue" ...Il est la traduction d'une "communauté" ouverte et solidaire, non seulement pour la France, ...mais pour tous les pays qui l'ont adopté ...et cet héritage "illustre" doit être "défendu" pour la postérité...