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Réflexions sur l'actualité en tous genres.

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La nuit du 4 août

   Le 14 juillet 1789 est devenu, avec la prise de la Bastille à Paris, le symbole de la chute de la monarchie absolue en France, mais ce n'était qu'une révolution "politique" aboutissant au partage du gouvernement entre le "Roi" et les représentants du "peuple", celui-ci restant partagé en 3 "ordres", d'une part les ordres dits "privilégiés" - le Clergé et la Noblesse - et le troisième ordre désigné non sans mépris par l'expression résiduelle de "Tiers-Etat" ...Il fallut que les représentants des 3 ordres finalement réunis en Assemblée "Nationale" constatent que cette révolution politique avait entraîné de nombreux troubles en province - notamment de la part des paysans se soulevant pour exiger la suppression des "droits féodaux" et suscitant ainsi la "Grande Peur" - pour qu'ils décident dans l'urgence, pendant la "nuit" du 4 août 1789 de voter l'abolition des privilèges ...Dès lors la révolution n'était plus seulement politique, elle devenait une révolution "sociale"... C'était l'organisation même de la société française qui était mise en cause, et d'ailleurs l'Assemblée Nationale ne tarda pas à voter peu après, le 26 août 1789, la Déclaration des Droits de l'Homme et du Citoyen, érigeant en principes la liberté, l'égalité ...et le bonheur "commun"...

 

   En fait, l'abolition des privilèges n'était que relative. D'abord, la notion même de "privilèges" n'était pas propre aux seuls ordres du Clergé - soit environ 130.000 personnes - et de la Noblesse - soit environ 300.000 personnes - mais concernait toute la population ..."mâle" ( puisque les femmes n'avaient pas accés aux droits de ...l'homme) - soit environ 13.000.000 de personnes...En effet, tous les hommes du royaume étaient alors couverts par au moins un privilège qui était celui de son "groupe" (géographique, professionnel, social) : ainsi, il fallait en ville posséder le droit de bourgeoisie pour briguer une magistrature ...Seuls ceux qui n'avaient pas de groupe n'avaient aucun droit réel, comme les étrangers n'ayant que le "droit d'aubaine" ...D'autre part, malgré l'éclat apparent de la décision d'abolition des privilèges par l'Assemblée Nationale, Louis XVI renâcla à la sanctionner - c'est-à-dire à la légaliser - déclarant même alors : "Si la force m'obligeait à sanctionner, alors je cèderais, mais alors il n'y aurait plus en France ni monarchie, ni monarque" ...Le "pauvre" Louis XVI ne pouvait pas savoir qu'il anticipait ...mais il n'en dut pas moins la sanctionner le 5 octobre 1789, après avoir été ramené de force de Versailles à Paris ...Alors seulement la notion de "privilèges" fut limitée à ceux qui en abusaient - notamment les détenteurs de "droits féodaux" (lever des impôts en argent ou nature, chasser, avoir des tribunaux particuliers ...la discrimination allant jusqu'au droit d'être décapité ...et non pendu, en cas de condamnation à mort !) ...Les "privilégiés n'en eurent pas moins la possibilité de racheter leurs droits par un décret du 15 mars 1790 ...et il fallut attendre le 17 juin 1793 avec la 1ère République pour que la Convention vote la suppression totale des privilèges sans indemnités, et que les titres féodaux soient définitivement détruits...

 

   Ainsi alla la France alors ...Et les régimes se succédèrent ...Napoléon, qui avait instauré l'Empire ...pour défendre la République, re-créa une noblesse ...et ensuite, la Restauration rétablit certains privilèges ... Et la société évolua en fonction des progrès économiques ...Pendant la Monarchie de Juillet, Louis-Philippe proclame : "Enrichissez-vous !" ...Mais ce n'est le cas que d'une "minorité" de bourgeois ou riches paysans, dont beaucoup avaient récupéré les biens des émigrés ou du Clergé (Biens Nationaux) ...Car il y avait une majorité d'au moins 75 % de "pauvres", dont la misère explique le succès des doctrines "socialistes" ...s'opposant à ces nouveaux "privilégiés" qu'étaient ...ce qu'il était convenu d'appeler d'une expression générique et non mathématique ..les "200 familles" (*) ...Qu'en est-il maintenant ?...En étant à la ...5ème République, la France a-t-elle accédé enfin à un juste partage des richesses ?...

 

   ...Pas du tout ... L'opinion populaire considère que la pauvreté s'est au contraire étendue et que l'écart entre les "pauvres" et les "riches" s'est accru ...La réalité est en fait plus nuancée, à en croire l'analyse effectuée en 2008 par "L'Observatoire des Inégalités" (**) :

   "En dépit du ralentissement de la croissance, la France continue à s'enrichir ...Entre 1998 et 2008, le revenu global des ménages après impôts et prestations sociales s'est accru de 260 milliards d'€ (en euros constants) ...Mais cette richesse n'a été captée que par une minorité...

   Au cours de ces 10 années, les 10 % les plus pauvres ont reçu 2,8 % de l'ensemble de la richesse nationale, alors que les 10 % les plus riches ont disposé de 31,7 %, soit une part 11,3 fois plus importante ...Si l'enrichissement était réparti de façon égale, chaque tranche de 10 % (des Français) aurait dû recevoir 26 milliards d'€ ...Or les 10 % les plus pauvres n'ont touché que 7,3 millards d'€, alors que les 10 % les plus riches ont reçu 82,7 milliards d'€ ...Au total, les 40 % les plus démunis ont reçu seulement 22 % de l'ensemble des revenus" ...CQFD !...

 

   Alors, faut-il une nouvelle nuit du 4 août ?...

 

(*) http://www.marianne2.fr/Fortune-le-retour-des-200-Familles_a189681.html

 

(**) http://www.inegalites.fr/spip.php?article1579


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