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5 décembre 2007 3 05 /12 /décembre /2007 16:54
   La visite du Président Sarkozy en Algérie me donne l'occasion de réfléchir à ce que j'ai pu connaître de ce pays :

   1. Ma 1ère expérience date de l'année 1954, peu après les premiers attentats des "fellaghas" dans les Aurès, alors que, jeune étudiant, j'avais été invité par des amis qui venaient d'être nommés Professeurs à Constantine dans le cadre d'une politique de "départementalisation" ayant entraîné l'affectation de nombreux fonctionnaires "métropolitains", notamment pour l'enseignement... C'était l'époque où François Mitterrand, Ministre de l'Intérieur,déclarait : "L'Algérie, c'est la France"... J'en avais gardé des souvenirs assez contrastés :
   - d'abord, de l'admiration pour la beauté de ce pays, bien différente de celle la France...
   - ensuite, de la reconnaissance pour l'hospitalité de ses habitants, en particulier celle des collègues musulmans de mes amis, qui m'avaient fait visiter la "casbah" de Constantine, où j'avais été accueilli avec sympathie (ex: le thé dans de petits verres, remplis en faisant couler de haut la théière)...
   - Enfin, malheureusement, le dégoût, quand, du haut de la chambre d'hôtel dominant la place centrale au bord du ravin, j'avais assisté à une "ratonnade", des hommes vêtus de "djellabahs" y étant rassemblés sans ménagement... Je ne comprenais pas, ayant été témoin de la bonne entente entre "Français" et "Algériens" au niveau du petit peuple...

   2. Ma 2ème expérience en 1956-57, cette fois comme "troufion" envoyé, après 18 mois de service en France, comme "maintenu" en Algérie pendant 10 mois ...Même si les hasards de l'affectation militaire m'amènent finalement  ...à Reggane, au Sahara, près du désert du Tanezrouft (explosion atomique vue ...à 20 kms), j'ai néanmoins le temps de me faire une idée de "l'Algérie profonde"...Je n'ai pas connu les horreurs qui ont pu être commises de part et d'autre et je les réprouve...Mais je garde à nouveau le souvenir de l'accueil sympathique des "Algériens" : après avoir été refoulé, en compagnie de camarades , d'un café "français" d'Aïn-Sefra, être reçu dans un "boui-boui" algérien qui alla jusqu'à interrompre une litanie arabe pour mettre de la musique française...

   3. Depuis lors, il s'est écoulé un demi-siècle... Je ne suis pas retourné en Algérie, mais j'ai toujours été attentif aux événements marquant ce pays... J'ai connu des "rapatriés", qui n'avaient de cesse de louer et de regretter l'Algérie... Et, comme tous les Français, j'ai connu des "Algériens" immigrés en France...et j'ai rencontré de vieux soldats fiers d'arborer leurs médailles obtenues dans des troupes françaises de la Guerre 1939-45... Idéaliste incorrigible, je n'ai jamais compris comment on avait pu les parquer - immigrés ou anciens "harkis" - dans des quartiers réservés...
suscitant ainsi chez eux et surtout chez leurs enfants "sans patrie" cette rancoeur contre la France, les conduisant de façon significative à siffler la Marseillaise lors d'un match de football entre la France et l'Algérie...

   Dans ces conditions, il ne m'est pas possible d'accepter, dans les relations avec l'Algérie, je ne sais quelle "repentance"... d'abord, parce que la repentance me paraît être une "sottise" (pour parler poliment...), dans la mesure où les "contemporains" n'ont pas à juger -en bien ou en mal - ce que les "anciens" ont pu faire dans un contexte différent, alors qu'ils ont déjà le plus souvent à "balayer devant leur porte"...Et ceci à fortiori pour l'Algérie, où il y a eu surtout ce qu'une lectrice du Figaro du 5 décembre 2007 appelle un rendez-vous manqué : "Il est dommage de n'avoir pas pu construire une nation aux origines multiples dans ce beau pays !..."
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commentaires

D
   En complément à mon article et à mes réponses aux commentaires, je conseille la lecture de la lettre d'André Savelli au Président algérien Bouteflika, citée par Candide dans son blog Libre-Cours (Cf liens - Article "L'Algérie - une autre vérité"), même s'il faut regretter que l'auteur ne souligne pas suffisamment qu'en parallèle avec les apports positifs de la France, il y a eu des aspects négatifs (pas de représentation démocratique des autochtones, brutalité d'une répression en 1946, exploitation par certains "féodaux" européens) qui n'ont pas permis de réaliser en temps utile la construction d'un Etat multi-ethnique associé à la France à l'image de l'Afrique du Sud dans le Commonwealth britannique ...ce qui aurait évité tous les drames ultérieurs et l'incompréhension toujours vive entre Français et Algériens...
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N
Je suis tout à fait d'accord avec la courte mise au point de Mr Daumont, à savoir la différence qu'il fait entre "Repentir" et "repentance".Ca a son importance et elle est de dimension.
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D
Je suis d'accord avec votre analyse concernant la contribution des Nord-Africains, et notamment des Algériens, aux efforts de guerre , qui justifient une reconnaissance de la France... Et je conviens de la nécessité de réprouver les violences et les massacres, à la fois des Algériens et des "Français", pendant la Guerre d'Algérie... Mais tous ceux qui, comme moi, n'ont rien à se reprocher, au contraire, n'ont pas à faire acte de "repentance" ...Que l'Etat ait le courage de dénoncer les actes inadmissibles et leurs auteurs ou profiteurs, mais en aucun cas je n'accepterais pour ma part qu'il ne se livre à une "repentance" au nom de tous les citoyens français...
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P
D'accord avec Citoyen, je ne vois pas le rapport, Jean, entre votre développement et votre conclusion contre la repentance, notion sur laquelle on entend aujourd'hui beaucoup de confusion. D'abord, il y a ceux qui disent : le FLN a fait des horreurs pendant la guerre d'Algérie, nous reconnaîtrons nos erreurs quand ils reconnaîtront les leurs. Il est exact que le régime algérien actuel est très hypocrite sur cette période, mais ce n'est pas une raison suffisante pour que la France n'assume pas son Histoire avec ses, avec nos critères éthiques et sans idée de réciprocité.Ensuite, l'héritage, ce n'est pas seulement ces sept ou huit années de guerre, c'est presque un siècle et demi d'une colonisation qui a été violente, et durant laquelle la France a semé les germes de la détestation, notamment en créant des catégories de citoyenneté à géométrie variable en fonction de critères ethniques ou de circonstances de guerre.Enfin le passif, c'est justement cette dette immense que la France a contractée en recourant massivement à l'Armée d'Afrique (en majorité des troupes maghrébines, pardon de simplifier) aux combats pour la libération de la France occupée et pour l'éradication du nazisme en Europe. De l'Italie jusqu'à Berchtesgaden, ce sont des cimetières musulmans qui attestent aujourd'hui de ce sacrifice, non payé de retour et qui a abouti aux soulèvements de Sétif et Constantine après la guere.Avant même la prise de conscience du général De Gaulle, historique mais plus tardive, le général Leclerc - devenu maréchal - avait eu une claire vision du problème de la décolonisation lors d'une trop brève mission en Algérie, après avoir compris de la même façon le problème de l'Indochine, mais sans être écouté alors par le général De Gaulle. Leclerc a disparu trop tôt, dans une tempête de sable. La conscience de la France reste, et la repentance est d'abord un effort sur soi-même, pas une capitualtion...Cordialement.
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D
   Je vous remercie de votre commentaire, dont je partage la philosophie avec quelques nuances :   - Je suis contre toute violence, mais je suis aussi sans illusion sur ce sujet (voir mon article précédent)...Gandhi, l'apôtre de la non-violence, est mort par la violence...   - Je fais une différence entre le repentir, qui est le regret de ses propres fautes et que chacun doit pratiquer,   ...et la repentance, qui est le regret de la faute des autres et qui ne me paraît pas justifiée...
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