S'il est un domaine où l'égalité doit être appliquée sans restriction, c'est bien celui de la santé... Tel est d'ailleurs le sens de célèbre Serment d'Hippocrate, ré-actualisé à l'article 109 du Code de Déontologie Médicale en 1995, et prescrivant de "respecter toutes les personnes, leur autonomie et leur volonté, sans aucune discrimination suivant leur état et leurs convictions"... Tel était aussi le sens de la création de la Sécurité Sociale en 1945 - et de la législation postérieure - devant permettre à tous les citoyens l'accès aux soins...
Malheureusement, divers indices montrent que cette égalité "théorique" est de moins en moins respectée dans la "pratique" :
- Déjà, chacun peut constater que de nombreux médicaments ne sont plus remboursés par la Sécurité Sociale ou ne le sont plus qu'à un "taux réduit"... Et comme le prix des médicaments n'est plus "plafonné" s'ils sont en vente libre, leur coût augmente naturellement dans la seule limite des règles "officielles" de la concurrence... Bien sûr, l'argument d'un tel "déremboursement"est encore et toujours de réduire le déficit de la Sécurité Sociale, car il est bien plus facile de faire payer à des millions de gens modestes - notamment des personnes âgées en ayant le plus besoin - une médecine re-qualifiée "de confort"... que de procéder aux réformes de structure nécessaires...
- Un Rapport de "l'accès aux soins" réalisé en 2005 par l'organisme des "Médecins du Monde" sur la santé des populations précaires, est également un motif d'inquiétude : il révèle en effet que le comportement des médecins généralistes lors des demandes de rendez-vous des "bénéficiaires des minima sociaux" aboutit à 37 % de refus à l'égard des patients relevant de l'AME (Aide Médicale de l'Etat) et à 10 % pour ceux relevant de la CMU (Couverture Maladie Universelle)... Le même rapport explique ce comportement - sans pour autant le justifier - par le fait que la formation initiale des étudiants en médecine ne donne pratiquement aucune place à la "santé publique" et notamment aux questions de précarité...
- Diverses questions évoquées dans une actualité récente traduisent le même éloignement du principe de solidarité... Ainsi, lors d'un récent forum, un homme politique "éminent" n'a pas hésité à s'interroger sur la nécessité de "libérer" les hôpitaux de la charge matérielle et financière représentée par les malades incurables - surtout, mais pas seulement, des personnes âgées - en clair, à recommander l'euthanasie... Et à la fin d'octobre 2006, on s'est félicité de la mise au point d'un vaccin contre le cancer du col de l'utérus - qui est certes une grande victoire médicale, riche de promesses - mais on n'a pas insisté sur le fait que ce vaccin devra être pris en 3 doses au prix actuel de 145,94 Euros la dose - sans remboursement de la Sécurité Sociale - , autrement dit qu'il ne sera pas accessible à tous, et notamment "aux pauvres"...
Dans ces conditions, d'ores et déjà, on peut parler de "médecine à deux vitesses"... Et comme le mal gagne aussi d'autres secteurs comme l'économie, l'éducation, le travail..., c'est finalement une "France à deux vitesses" qu'il faut évoquer, avec les risques d'explosion sociale qui peuvent en résulter...