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12 octobre 2007 5 12 /10 /octobre /2007 15:20
   Il y a parfois dans l'actualité des contradictions caractéristiques de la versatilité des hommes, et notamment des Français... Un bel exemple en est, cette semaine,  la coïncidence entre l'inauguration à Paris d'un Musée de l'Immigration et la polémique au Parlement autour d'un amendement prévoyant des tests ADN pour des candidats à l'immigration.


   L'immigration, comme l'émigration, c'est-à-dire globalement les mouvements de population ont toujours été des éléments du comportement des hommes... Dès les temps préhistoriques, des tribus ou des peuples se déplacent en fonction de leurs besoins ou des aléas climatiques, et certains territoires en connaissent plus que d'autres : c'est le cas de l'Europe, qui apparaît comme un promontoire de l'immense Asie, et notamment de la France qui est elle-même une presqu'île de l'Europe se terminant de façon significative en Bretagne par le Finistère.. Déjà, au début de la Préhistoire, l'homme de Néanderthal en avait été évincé par l'homme de Cromagnon, 1er des "immigrants"... Et bien plus tard - entre 10.000 et 5000 ans av.JC - les hommes du Néolithique, véritables fondateurs de nos paysages avec l'exploitation de la terre, la création de villages et les pierres dressées, ont été évincés à leur tour par les Indo-Européens, nouvelle vague d'immigrants, en particulier les "Celtes" (nom grec) ou "Gaulois" (nom romain) qui se répandent dans toute l'Europe... "Autrefois, notre pays s'appelait la Gaule et ses habitants les Gaulois", disaient naguère les premiers livres d'histoire... Fumisterie !... Il y avait eu auparavant bien d'autres mouvements de population, et il y en eut encore d'autres, ...puisque la France tient son nom d'autres envahisseurs, c'est-à-dire d'immigrants ultérieurs, les Francs, venus de Germanie avec les Burgondes, les Wisigoths et les Alamans... Et avec tout cela, comme disait le chanteur Maurice Chevalier, on a fait à travers des siècles d'histoire, de "bons Français", avec le drapeau tricolore, la Marseillaise, et ...le coq ...gaulois !


   Et pourtant les "Français" n'aiment pas les étrangers, comme le démontrent régulièrement les sondages, en particulier le dernier révélant qu'en majorité ils approuvent l'instauration éventuelle de tests ADN pour l'immigration... En fait, le problème n'est pas nouveau : déjà, dans l'histoire de la France, il y avait eu de fréquentes manifestations d'hostilité, par exemple un antisémitisme récurrent qui s'opposait à l'arrivée et à l'installation des Juifs, souvent victimes de "pogroms" parce qu'ils étaient considérés en tant "qu'infidèles" comme responsables de tous les maux... Mais au 20ème siècle encore, avec le développement industriel, les "immigrants" italiens, espagnols ou polonais n'étaient pas "bien vus", même s'ils étaient venus pour faire les travaux dont les "Français" ne voulaient plus ... Cela était même vrai pour les ...Belges, j'en parle en connaissance de cause puisque - malgré mon nom "bien français" - j'ai eu des grands-parents maternels d'origine flamande (Van N...) qui étaient plus ou moins "marginalisés" dans leur bourgade "d'accueil"... D'ailleurs, à l'époque, les "étrangers" devaient bien "bien se comporter", à en juger par le cas des ouvriers polonais renvoyés dans leur pays en 1934 pour avoir participé à une grève des mineurs... Le problème est identique à notre époque, et il s'est même aggravé en raison de l'augmentation rapide du nombre des "immigrés" (passés en 50 ans de 1 à 5 millions environ), et aussi d'un changement d'origine (presque la moitié d'Africains) qui a malheureusement favorisé le racisme jusque dans le domaine politique...


   Il n'en est pas moins vrai que, si on interroge individuellement des Français, ils vous répondront le plus souvent, la main sur le coeur : "Moi... raciste ? Jamais !"... Et ils citeront volontiers l'épicier du coin qui est un tunisien sympathique, évidemment pas comme les autres... De même ils sont fiers des chanteurs "français" comme Jacques Brel ou Johnny Halliday (d'origine belge...), ou encore Sylvie Vartan (d'origine bulgare...) et Charles Aznavour (d'origine arménienne...)....Et ils applaudissent aux exploits de "leurs" sportifs, comme Platini (Italie), Kopa (Pologne), Mimoun et ...Zidane (Afrique du Nord)... Ils vont même jusqu'à confier la gestion de l'Etat à des hommes politiques issus d'une famille étrangère, comme Balladur (Turquie) et, bien sûr, Sarkozy (Hongrie) !... Il est vrai que toutes ces personnalités sont honorées, non en raison de leur "naissance", mais en fonction de leur "mérite" personnel... Car les Français apprécient les immigrés ou enfants d'immigrés qui contribuent à la "réputation" de la France, mais ils ne pardonnent pas et sont même parfois d'une excessive sévérité pour ceux qui ne s'adaptent pas et encombrent les prisons...

   C'est pourquoi il convient d'adopter une "juste mesure" dans l'étude des problèmes posés par l'immigration :
   - Les races : cette notion a longtemps été le prétexte aux discriminations, et   un ...Français, Gobineau, a même publié vers 1855 un "Essai sur l'inégalité des races humaines" prétendant prouver la supériorité de la race blanche... Et longtemps les Européens ont argué de leurs progrès techniques pour considérer les autres civilisations comme arriérées ou primitives... On sait à quelles horreurs cette conception a abouti... Et ceci alors que la notion même de "race" est fausse, et que la prétention de préserver la pureté d'une race est une idiotie scientifique, puisqu'il est désormais prouvé que les groupements humains maintiennent leur vitalité par les "croisements", alors que la "consanguinité" entraîne la dégénérescence...
   - Les coutumes : les Français qui avaient longtemps maintenu entre eux des préventions ont finalement fait une cuisine commune avec la choucroute alsacienne, le cassoulet toulousain, la bouillabaisse marseillaise et la ratatouille niçoise... Et il en a été de même, malgré les réticences initiales, de la paëlla espagnole, du rizotto italien ou du goulasch hongrois... peut-être parce qu'il y avait un fond de sauce commun de traditions judéo-chrétiennes... Mais l'assimilation des populations africaines est manifestement plus difficile car, même s'ils apprécient le couscous ou le méchoui, les "Français" sont souvent rebutés par la religion musulmane qui mérite certes leur respect mais ne correspond pas à leurs habitudes (ex: l'affaire du voile). Et cette difficulté est d'autant plus grave que les immigrés sont plus nombreux qu'autrefois...
   - Les flux : l'assimilation des immigrés s'est faite progressivement jusqu'au 20 ème siècle dans la mesure où leur nombre était relativement limité et leur répartition plus diluée dans la population française... Des "spécialistes" ont pu affirmer que, jusqu'à 15 % environ d'un groupe, l'intégration se réalisait facilement en 2 générations... Le problème est que, même si la proportion d'immigrés est actuellement de 8 % pour l'ensemble de la France, elle dépasse largement les 15 % dans certains secteurs, notamment les banlieues des grandes villes... Or la politique de la ville - ou plutôt l'absence de "politique" au sens originel (gestion de la "cité") - a abouti à la création de "ghettos" où les immigrés se retrouvent seulement entre eux, souvent d'ailleurs par pays d'origine..., ce qui évidemment ne permet plus de véritable intégration, ...l'école elle-même - creuset naturel et traditionnel d'assimilation - étant désarmée, faute de structures adaptées... Et un cercle vicieux s'est ainsi mis en place, les immigrés et leurs enfants rejetant une société qui les rejette...


   Dès lors, il est nécessaire d'avoir une politique cohérente capable d'associer le respect d'un certain équilibre social avec le respect de la dignité humaine des immigrés... Il est certain, comme l'a dit le socialiste Michel Rocard, que "la France n'a pas vocation à accueillir toute le misère du monde, même si elle a une tradition d'hospitalité"... Mais pour autant elle ne peut pas se contenter de renvoyer les immigrés en situation irrégulière dans des "charters", comme le voulait Edith Cresson, autre socialiste... Est-ce à dire qu'il faut instaurer des tests ADN pour freiner, sinon arrêter le "regroupement familial"?... Il est "humain" que les immigrés veuillent regrouper leur famille...Les Français le font, quand ils sont installés "à demeure" à l'étranger... Ce qu'il aurait fallu faire, c'est mieux contrôler l'immigration auparavant, et ne pas encourager le regroupement, comme l'a fait Lionel Jospin, encore un socialiste... Maintenant que les familles sont en France ou que le chef de famille s'y trouve avec un métier, il faut s'en accommoder, tout en prenant des dispositions pour l'avenir :
   - Analyse des problèmes familiaux au "cas par cas", et non d'une façon "collective" qui ne tient pas compte des situations personnelles
   - Pour les immigrés refusés à l'entrée en France, notamment faute d'un emploi, concertation avec les représentants du pays d'origine pour leur reclassement et versement d'une insemnité de ré-installation
   - Pour les immigrés admis en France, suivant des critères précis, en particulier la preuve d'un emploi, mesures d'intégration pour le logement, l'école et la vie associative

   Quant à l'utilisation de tests ADN, on peut admettre sur un plan "théorique" qu'ils aient une certaine justification (*), mais sur le plan "pratique" ils ne peuvent que susciter l'inquiétude, comme naguère le "croisement des fichiers informatiques" qui aurait pu conduire à des abus - notamment pour la recherche d'emploi - si le CNIL n'y avait pas fait opposition... Car, si on met le doigt dans l'engrenage à propos des immigrés, on pourra passer progressivement de la "génétique" à "l'eugénisme"... Miaux vaut s'en tenir à des solutions "humaines", s'inspirant des réussites dont s'inspire le nouveau Musée de l'Immigration...


(*)Voir Article Initiative Européenne (Cf Liens) "Je ne signerai pas la pétition" 
           

   
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commentaires

D
   Quelques précisions pour éviter toute méprise :    1.Les mouvements de population ont eu lieu de tous temps et ne sont donc pas condamnables, car la "mobilité" est un élément de la nature humaine. Certains peuples ont d'ailleurs toujours eu la vocation d'être "nomades"...    2.Comme on n'est tout de même plus au temps de l'immigration "sauvage" (invasions), il est normal qu'un pays contrôle l'entrée dans son territoire... En l'occurrence, la France a volontiers pratiqué l'immigration "volontaire" (ex: Polonais dans les mines de charbon avant 1940, Algériens ...alors "français" après 1945), pour suppléer l'absence ou l'insuffisance de main d'oeuvre "hexagonale"...    3.Il est regrettable que cette immigration ne soit pas restée "choisie", en raison de l'inefficacité des contrôles et de l'acceptation irréfléchie de regroupement familial même en l'absence d'emploi... Pour autant, il est désormais "inhumain" d'empêcher le regroupement pour des immigrés qu'on n'a pas su refouler en temps utile...   4.Par contre, il est bon de prendre maintenant toutes dispositions nécessaires pour éviter l'immigration clandestine et en conséquence le regroupement familial correspondant. Mais il in'est pas possible sur le plan "éthique" (cf la "commission" qui n'a rien à voir avec des "faiseurs d'opinion") d'accepter l'utilisation des tests ADN, en dehors de cas-limites comme l'identification de criminels ... Le code ADN, comme les empreintes digitales, le visage, les organes, etc...appartient en propre à chaque individu, qui doit conserver le contrôle absolu de son utilisation et doit avoir seul le pouvoir d'autoriser celle-ci. C'est d'ailleurs le sens du "compromis parlementaire" qui est finalement adopté...
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Je suis d'accord avec Candide, et  j'ajoute que c'est un signal fort pour les pays africains: pour dire ça suffit !L'hospitalité, c'est quand on invite des gens à venir chez soit, pas quand on les trouve dans le salon ou dans la cuisine à vider le frigo. Dans ce cas, ce sont des squatters et on les vire.
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C
La logique de l'engrenage dans lequel on ne veut pas mettre le doigt conduit à un résultat contradictoire.Dans les situations que vous décrivez, la difficulté est d'éviter le traitement des cas, TOUS particuliers, selon des critères indéfinis, sujectifs et variables.  Où chacun gardera - quand il est refusé, et il faudra en refuser - l'intime conviction qu'il est victime d'un traitement inéquitable.le test scientifique apporte cette neutralité qu'aucun autre dispositif ne peut apporter.le débat étant maintenant dévoyé par les faiseurs d'opinion, on a plus rien à attendre d'une confrontation qui n'aura finalement pas eu lieu.sans même vous faire remarquer qu'à terme l'identification par ADN est aussi inéluctable que le branchement à l'électricité. ce sera une question de survie pour être traité par la médecine réparatrice de demain que de posséder son code génétique sur soi.
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